Une revue de littérature prône une juste consommation d’aliments d’origine animale pour la santé humaine (Article de synthèse)
Le Pr Alice Stanton, du Royal College of Surgeons en Ireland, publie une revue de la littérature scientifique dans laquelle elle alerte une nouvelle fois sur les risques de carences en micronutriments et en protéines associés à une alimentation trop végétalisée. « Les recommandations alimentaires devraient conseiller de modérer les consommations excessives d’aliments d’origine animale, plutôt que de les limiter drastiquement voire de les exclure de l’alimentation humaine ».
Le Pr Alice Stanton, du Royal College of Surgeons de Dublin (Irlande), est fermement opposée aux discours nutritionnels extrêmes qui visent à végétaliser l’alimentation à outrance. Il y a quelques mois, elle s’insurgeait contre l’utilisation de rapports erronés pour établir des recommandations visant à diminuer la consommation d’aliments d’origine animale (voir notre Article d’analyse); aujourd’hui, elle publie dans la revue Frontiers in Nutrition un nouvel article de perspective dans lequel elle alerte sur le risque de carences en micronutriments et en protéines que peuvent entraîner de nombreux régimes excluant tout ou partie des aliments d’origine animale.
Une végétalisation pour la planète plus que pour la santé humaine
Les régimes « ultra-végétalisés » sont prônés en premier lieu afin de remédier aux crises climatique et démographique qui font pression sur les ressources planétaires et donc le système alimentaire mondial. Réduire considérablement la consommation d’aliments d’origine animale apparaît comme la solution simple à cet enjeu majeur. Et les partisans d’une telle transformation de se déclarer convaincus que les régimes à base de végétaux ne seront pas seulement bénéfiques à la santé de la planète, mais aussi à celle de l’Homme avec une diminution attendue des maladies chroniques non transmissibles. Reste que l’Homme est par définition omnivore et que les aliments d’origine animale lui fournissent depuis des millénaires les apports en de nombreux nutriments et micronutriments difficiles à obtenir en quantités suffisantes via une alimentation exclusivement végétale. Afin de faire le point sur tout cela, le Pr Stanton examine dans cet article la fiabilité des allégations relatives à l’adéquation nutritionnelle et à la protection contre les maladies chroniques des régimes végétaux incluant des apports très réduits, voire inexistants, en aliments d’origine animale.
Des effets sur la couverture des besoins nutritionnels
Au travers d’une revue narrative poussée de la littérature scientifique la plus récente (76 références dont plus de 75 % publiées depuis 2020), Alice Stanton démontre qu’une consommation insuffisante de viande (< 2 portions/semaine) est associée à de très fortes augmentations de l’anémie ; chez l’enfant, à des retards de croissance et de cognition ; chez les personnes âgées, à l’ostéoporose et la sarcopénie, et ce, avec un niveau de certitude élevé. Elle estime par ailleurs évident que les réductions spectaculaires de consommation d’aliments d’origine animale, conseillées dans le cadre de nombreux régimes végétaux, aggraveront les carences en micronutriments et en protéines déjà répandues dans le monde. « L’impact sera particulièrement important dans les pays à revenus faibles et moyens, et sur les groupes vulnérables, notamment les femmes, les enfants et les personnes âgées », énonce-t-elle, reprenant les conclusions de l’éditorial récent de Ty Beal dans l’American Journal of Clinical Nutrition. Un fait d’ailleurs reconnu par l’un des membres de la commission EAT-Lancet, Jessica Fanzo, qui déplore que la plus grande biodisponibilité du fer et du zinc dans les aliments animaux, ainsi que la présence de facteurs antinutritionnels dans la plupart des végétaux riches en protéines, n’aient pas été davantage pris en compte lors de la définition du premier régime EAT-Lancet.
Quid de la protection contre les maladies chroniques non transmissibles ?
Du côté de la prévention des maladies chroniques non transmissibles par les régimes végétaux, les choses sont également à nuancer. Car la protection apportée semble être davantage due à la réduction des apports en calories et en sel, associée à l’augmentation des apports en fruits, légumes, noix et céréales complètes, plutôt qu’à la réduction des apports en aliments d’origine animale. De fait, « les éventuels effets négatifs absolus de la consommation des viandes rouge et transformée sur les maladies non transmissibles sont très faibles et incertains », rapporte le Pr Stanton. En outre, d’autres aliments animaux semblent quant à eux n’avoir aucun impact (viande de volaille et œufs) ou sont associés à des protections contre l’obésité, les événements cardiovasculaires, les troubles cérébraux et certains cancers (fruits de mer et produits laitiers). La chercheuse demande donc que soient réalisés des essais contrôlés randomisés rigoureux concernant les différents régimes végétaux à visée environnementale nouvellement proposés, afin de fournir des preuves claires de leur adéquation en micronutriments et protéines, avec ou sans supplémentation, enrichissement et/ou biofortification.
Prôner la modération plutôt que l’éviction
« Il est clair que toute preuve que la consommation modérée d’aliments d’origine animale est préjudiciable à la santé humaine est faible et incertaine », insiste Alice Stanton. Selon elle, la relation entre la viande rouge et la charge de morbidité est très probablement en forme de U. C’est-à-dire qu’une consommation excessive de viandes rouge et transformée (> 4 portions ou 500 g/semaine) pourrait être associée à une augmentation de la morbidité (bien que très faible et avec un faible niveau de preuves), mais qu’une consommation insuffisante (< 2 portions/semaine) le sera tout autant, voire davantage… C’est pourquoi elle conclut : « Je suis d’accord avec les appels à modérer les consommations excessives, mais pas à limiter trop largement ou exclure les aliments d’origine animale de l’alimentation humaine, pour parvenir à des régimes alimentaires sains et durables pour tous. »
Référence : Stanton AV. Plant-based diets-impacts of consumption of little or no animal-source foods on human health. Front Nutr. 2024 Sep 18; 11:1423925.
Source : Frontiers in Nutrition
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