Du champ à l’assiette : comment se construit la qualité nutritionnelle d’un aliment ? (Article d’analyse)
Comprendre comment s’élabore la qualité nutritionnelle des produits d’origine animale nécessite de prendre en compte les conditions de production et les modalités de transformation des aliments consommés, jusqu’aux pratiques domestiques. Avec comme objectif d’identifier des leviers majeurs sur lesquels il est possible d’agir tout au long de la chaîne alimentaire pour promouvoir une alimentation plus vertueuse.
Du champ à l’assiette : comment se construit la qualité nutritionnelle d’un aliment ? Tel était le sujet de la conférence organisée le 23 septembre 2021 par le FFAS (Fond français alimentation santé). Avec, pour cette première session, un focus sur la qualité des aliments d’origine animale, dont la consommation, et notamment celle de la viande, fait aujourd’hui l’objet de controverses pour des raisons environnementales et de santé.
Impacts des modes de production et des procédés
Véronique Santé-Lhoutellier, Directrice de recherche INRAE, Directrice de l’unité QuaPA (Qualité des Produits Animaux) est intervenue sur les impacts des modes de production et des procédés sur la qualité nutritionnelle des produits d’origine animale, en se fondant sur les résultats d’une expertise collective. Cet état des lieux critique des connaissances scientifiques publiées impliquait 20 experts sur des disciplines couvrant toute la chaîne alimentaire (production, abattage, transformation, consommation, sécurité sanitaire, nutrition santé) et a reposé sur 3 500 références, dont 62 % publiées ces 10 dernières années. L’analyse a porté sur 7 dimensions (propriétés commerciales, technologiques, organoleptiques…) de la qualité de l’aliment. Elle montre que les propriétés nutritionnelles, comme les 6 autres propriétés d’ailleurs, reposent sur de multiples facteurs intrinsèques et extrinsèques tout au long de la production (élevage, abattage, transformation industrielle, conservation, etc.).
L’alimentation animale : un facteur clé
Au rang des étapes clés de la qualité nutritionnelle des aliments : l’alimentation des animaux, qui constitue un levier d’action pour le profil en acides gras (particulièrement pour le porc et la volaille et dans une moindre mesure pour les herbivores), alors que la teneur en protéines (avec un profil en acides aminés indispensables équilibrés) et leur forte digestibilité (> 90 %) varient peu. Par exemple, une alimentation enrichie en graines de lin permet de multiplier par 5 la teneur en acides gras polyinsaturés oméga-3 de la viande de porc. Chez les ruminants, les modes de production favorisant l’utilisation de fourrages et d’herbe riment avec des teneurs en acides gras polyinsaturés, en vitamine E et en antioxydants supérieures. La production en agriculture biologique garantit quant à elle non pas un résultat, mais des moyens : traitements phytosanitaires réduits, traitements hormonaux proscrits et traitements médicaux limités (donc moindre risque d’antibiorésistance), conditions favorables au bien-être animal. L’impact du bio sur les propriétés nutritionnelles des produits animaux s’avère ainsi limitée : les viandes bio ne sont que soit légèrement améliorées (viande bovine, de poulet, voire viande ovine) soit non améliorées (œufs, viande de porc, poissons) ; une exception en revanche pour le lait bio qui présente un rapport oméga-6/oméga-3 réduit de moitié.
Attention aux procédés de transformation
A l’autre extrémité de la chaîne, des procédés de transformation et de conservation mal maîtrisés peuvent cette fois largement altérer la qualité nutritionnelle (nutriments oxydés, dénaturés par ajout d’additifs alimentaires…). Ainsi, le degré de cuisson de la viande s’avère crucial pour la disponibilité des nutriments et l’utilisation des acides aminés par l’Homme (température idéale ni trop froide, ni trop chaude, entre 70-75°C). Le degré de transformation, difficile à mesurer malgré les outils développés (Anova, Nutriscore…), doit également être pris en compte : la formulation des nuggets de volaille conduit à passer d’un produit riche en protéines et pauvre en lipides (filet, 1 % de lipides) à un produit élaboré riche en lipides (20 %), sucres et sel. Un exemple qui illustre la contradiction actuelle entre les exigences du consommateur qui se dit à la recherche d’une naturalisation de l’alimentation, mais qui consomme de plus en plus de produits transformés prêts à consommer.
Source : FFAS
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