Actualisation du livre blanc de la CNE sur le renouvellement des actifs en élevage (Article de synthèse)
En 2019, les professionnels de l’élevage, sous l’impulsion de la Confédération nationale de l’élevage (CNE), ont édité un livre blanc du renouvellement afin d’accompagner le choc attendu dans les transmissions d’exploitations. Ce document a été utilisé pour porter des enjeux forts, ainsi que des propositions de solutions auprès du public politique. Une nouvelle version 2023 vient de paraitre, afin de mettre à jour les données et les propositions faites pour les adapter à l’actualité et aux nouveaux enjeux.
Une population vieillissante, des candidats à l’installation trop peu nombreux pour compenser l’accélération des départs en retraite… L’élevage de ruminants est confronté à un choc démographique sans précédent. Alors que 50 % des éleveurs en place en 2018 devraient avoir quitté le secteur en 2027, le renouvellement des actifs représente un enjeu vital pour le secteur. La Confédération Nationale de l’Élevage a donc pris l’initiative de revisiter son Livre blanc sur le renouvellement des générations d’éleveurs de ruminants en France, paru en 2019. Les objectifs de cette version 2023 : établir un état des lieux actualisé et détaillé (enjeux du renouvellement, opportunités d’installation de nouveaux éleveurs), identifier les freins à l’installation et émettre des propositions et des recommandations pour impulser une nouvelle dynamique.
Une situation plus préoccupante pour l’élevage bovin
La première partie dédiée à l’état des lieux révèle des disparités marquées entre les filières. La situation s’avère ainsi plus préoccupante au niveau des élevages bovins laitier et allaitant particulièrement concernés, d’une part, par le vieillissement des chefs d’exploitations (plus de 50 % d’entre eux ont plus de 50 ans, et 20 % seulement ont moins de 40 ans) et, d’autre part, par les difficultés de renouvellement (taux de renouvellement de 40 à 50 % en production laitière, contre 80 % en moyenne tous secteurs agricoles confondus). Les élevages caprin et ovin affichent quant à eux des taux de remplacement des départs plus élevés (respectivement 106 %, 94 % et 91 % pour les chèvres, les brebis allaitantes et les brebis laitières), qui masquent cependant un turn-over important, avec une proportion élevée de carrières courtes à très courtes. De manière générale, la compensation des départs en retraite exigerait un doublement du nombre de nouveaux actifs (installés et salariés) en élevage de ruminants. Le secteur va donc devoir se montrer attractif.
Le frein : un secteur peu rentable
Mais qui dit attractivité, dit rentabilité… Or, en termes de rémunération des actifs agricoles non-salariés sur la décennie 2010-2020, l’élevage de ruminants occupe les dernières places du classement avec des résultats courants avant impôts par unité de travail annuel non salarié allant d’environ 18 000 euros en bovins viande à 25 000 euros en bovins lait (moyenne 2010-2020, par orientation en euros constants 2020). La faiblesse des revenus, le manque de visibilité économique et climatique (sécheresses à répétition) représentent ainsi des freins majeurs à l’installation. Autres écueils à surmonter pour les candidats à la reprise : l’augmentation du coût de cette reprise, en lien avec l’agrandissement des structures agricoles, et les difficultés d’accès au foncier et aux financements bancaires nécessaires aux investissements. L’isolement lié au milieu rural et la montée en puissance des lobbies anti-élevage sont aussi évoqués parmi les motifs de découragement, de même que la pression des grands prédateurs sur les élevages de plein air.
Mieux accompagner, mieux former
Face à ces difficultés, les auteurs envisagent trois axes d’actions pour promouvoir le métier d’éleveur et en favoriser l’accès à la reprise d’exploitation. Le premier s’intitule « Mieux accompagner, mieux former ». Il regroupe des propositions telles que la simplification et la coordination des dispositifs nationaux d’installation et de transmission, et la mise en place d’un suivi professionnel tout au long de la carrière. Autre préconisation : la déclinaison nationale du droit à l’essai. Ce dernier offre la possibilité de tester, pour deux personnes ou plus, un projet agricole en commun pendant un an, avec un retour à la neutralité juridique, économique et fiscale en cas d’échec. Sur le plan de la formation, les enseignements devraient évoluer vers un approfondissement des notions relatives à la comptabilité et à la gestion d’entreprise, et intégrer une sensibilisation aux outils permettant de réduire la vulnérabilité aux aléas climatiques.
Encourager la transmission et faciliter l’installation
Le second axe regroupe des mesures visant à encourager la transmission et à faciliter l’installation sur les plans juridique, fiscal, règlementaire et économique. Y sont évoquées l’exonération totale de taxe sur le foncier non bâti, l’amélioration de la transmission d’épargne de précaution, et l’atténuation des coûts de garantie bancaire. La variabilité des annuités de remboursement, et de la durée des prêts en fonction de la conjoncture sont également citées, afin de pallier la volatilité des résultats d’exploitation. Les auteurs insistent par ailleurs sur le rôle crucial des pouvoirs publics, dans le déploiement et l’application de la loi Egalim 2, qui impose la contractualisation entre agriculteurs et premiers acheteurs, avec des prix négociés pour tenir compte des coûts de production.
Recréer du lien entre l’élevage et la société
Enfin, le dernier axe compile des propositions pour recréer du lien entre l’élevage et la société : amplification des efforts de communication, basée sur la diffusion de messages concertés et positifs ; sensibilisation des élèves des filières générales aux modalités de production des aliments. Les auteurs prônent également des initiatives locales d’intégration des nouveaux installés et de développement du salariat (création de groupements d’employeurs pour partager le coût d’un salarié, formation des éleveurs au management), afin de diminuer la charge de travail et faciliter la vie des futurs candidats à ce métier essentiel et menacé.
Pour en savoir plus : Livre blanc de la CNE sur le renouvellement des actifs en élevage (Version 2023)
Source : CNE
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