Alimentation des enfants : ce que les chercheurs de l’INRA pensent de la cantine (Article de synthèse)
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L’INRA vient de publier un dossier de presse de 32 pages dédié à l’alimentation des enfants, qui compile l’ensemble des travaux des chercheurs sur le sujet, sous le titre « Alimentation des enfants : quand les chercheurs se mettent à table ». Forcément, la cantine y occupe une place conséquente. Zoom sur ces recherches en matière de restauration scolaire.
Au menu des chercheurs de l’Inra : les repas de nos enfants, dont notamment ceux pris en restauration scolaire où déjeune plus d’un élève sur deux. Disons-le d’emblée : les scientifiques attribuent une bonne note aux cantines scolaires françaises, comme le rappelle le dossier de presse que vient de publier l’Inra, afin de valoriser les différents travaux publiés par ses équipes.
Une très bonne qualité nutritionnelle
Pièce maîtresse de la partie du dossier de presse dédiée à la restauration scolaire : la publication dans Nutrients des chercheurs Florent Vieux, Christophe Dubois et Nicole Darmon. Pour juger de la qualité des aliments servis, les chercheurs ont analysé 40 séries de 20 repas. La qualité nutritionnelle a été estimée par l’adéquation nutritionnelle moyenne (ANM), un indicateur qui reflète l’adéquation entre les teneurs en nutriments protecteurs (protéines, fibres, vitamines, minéraux, acides gras essentiels…) dans les repas et les recommandations d’apports de ces nutriments pour les enfants.
Et les nouvelles sont bonnes ! Les séries observées respectaient en moyenne 9,7 critères fréquentiels sur 15 : par exemple, les plats protidiques ayant un rapport protéines/lipides ≤ 1 ne doivent pas être servis plus de 2 fois dans une série de 20 repas successifs. En outre, le déjeuner apportait en moyenne 36 % des recommandations d’apports journaliers en énergie et la moitié (49 %) des besoins journaliers en nutriments protecteurs… soit une très bonne qualité nutritionnelle moyenne.
De l’importance des critères nutritionnels
Autre exercice auquel se sont prêtés les chercheurs : simuler cinq scenarios afin d’évaluer l’intérêt des critères fréquentiels pour la qualité nutritionnelle des repas. Rappelons en effet que la composition des repas servis dans les cantines scolaires est encadrée par des critères nutritionnels qui fixent la fréquence de service des aliments, via une liste de 15 critères fréquentiels.
Les résultats de cette simulation : plus les critères fréquentiels sont respectés, plus la qualité nutritionnelle augmente. Ainsi, l’ANM la plus élevée était obtenue pour le scénario « Respect total des critères », confirmant l’intérêt nutritionnel des directives.
Le retrait du plat protidique : le pire scenario
Plus surprenant de prime abord : le scénario présentant la plus faible ANM n’est pas celui « Aucun respect des critères », mais « Retrait du plat protidique » ! Une mauvaise qualité nutritionnelle qui s’explique par le fait que les plats protidiques apportent non seulement la majeure partie des protéines, mais aussi de nombreux nutriments indispensables à la santé, comme les acides gras oméga 3 à longue chaîne, les vitamines B3, B6, B12 et D, le fer, le zinc, l’iode et le sélénium.
La simulation « Remplacement des viandes et poissons », qui consistent à remplacer les plats protidiques contenant de la viande ou du poisson par des plats n’en contenant pas, ne fait guère mieux : son ANM est comprise entre celles des séries « Retrait du plat protidique » et « Aucun respect », du fait non seulement de la perte des nutriments indispensables apportés par la viande et le poisson, mais aussi du manque de diversité des plats de remplacement actuellement servis dans les écoles (essentiellement des quiches, tartes salées, quenelles, riz en sauce…).
Ainsi, cette étude montre que la généralisation du service de repas sans viande ni poisson détériorerait la qualité nutritionnelle de la restauration scolaire, si un effort concomitant n’est pas fait sur la composition des plats servis en substitution.
Également sous la loupe des chercheurs
Les chercheurs de l’Inra étudient également de nombreux autres éléments de l’alimentation de nos têtes blondes, qu’il s’agisse des légumes verts (Comment optimiser les processus de transformation pour préserver le profil nutritionnel des légumes ? Comment les faire aimer aux enfants ?), des pâtes (Quid des pâtes aux légumes ?), ou encore des produits locaux et bio (Quels leviers pour augmenter leur poids parmi le milliard de repas servis en cantine scolaire ?), du gaspillage (Comment le limiter, sachant que 28 % du repas n’est pas consommé et qu’il s’agit souvent de l’accompagnement et du pain ?) ou des goûts et comportements alimentaires des enfants.
Source : INRA.
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