Le rapport 2023 de la FAO redonne aux aliments d’origine animale leur place de pourvoyeurs essentiels de nutriments (Article de synthèse)
Un rapport de la FAO paru le 25 avril 2023 réaffirme le rôle essentiel des produits d’origine animale terrestre, parmi lesquels la viande rouge, pour parvenir à des régimes alimentaires à la fois sains et durables. Ces aliments sont même déterminants pour atteindre les objectifs nutritionnels mondiaux pour 2025 et les objectifs de développement durable (ODD) en lien avec la santé des populations.
Un rapport de la FAO intitulé « Contribution des aliments d’origine animale terrestre à des régimes alimentaires sains pour améliorer la nutrition et la santé » montre que cette catégorie d’aliment est essentielle à l’Homme, non seulement pour composer des régimes alimentaires sains, mais aussi d’un point de vue écologique, l’élevage extensif ayant toute sa place dans la gestion durable de l’environnement. Cette étude, qui compile les données et informations de plus de 500 articles scientifiques et près de 250 documents d’orientation, offre l’analyse la plus complète réalisée à ce jour des bénéfices et des risques liés à la consommation d’aliments d’origine animale terrestre (AOAT), à savoir la viande, les œufs et le lait.
Bénéfices et risques de la consommation de viande rouge tout au long de la vie
Sur le plan nutritionnel, les AOAT fournissent des protéines de qualité supérieure, un certain nombre d’acides gras essentiels, du fer, du calcium, du zinc, du sélénium, de la vitamine B12, de la choline et des composés bioactifs comme la carnitine, la créatine et la taurine, qui assurent des fonctions essentielles pour la santé et le développement.
S’agissant de la consommation de produits carnés, des données solides montrent les bénéfices de la consommation de viande rouge maigre sur la santé musculaire des personnes âgées, ainsi que sur le statut en fer chez l’adulte en général. Concernant les enfants, des études systématiques mettent en évidence certains avantages de la consommation d’AOAT en termes de croissance (état staturo-pondéral) chez les nourrissons et les jeunes enfants. Toutefois, l’obtention de résultats mitigés lors d’études menées dans différents pays souligne l’importance de prendre en compte le régime alimentaire global de l’enfant, ainsi que d’autres facteurs contextuels pouvant affecter la croissance et le développement de l’enfant, lors de l’évaluation des relations entre consommation d’AOAT et statut nutritionnel.
Voici pour les avantages. Côté « inconvénients », les résultats des analyses montrent que la consommation de quantités modérées de viande rouge non transformée (de 9 à 71 g/j, soit un maximum 500 g/semaine tel que préconisé par l’Anses[1] en France ou le WCRF[2] à l’échelle internationale) ne présente qu’un risque minimal pour la santé. En revanche, le rapport confirme qu’une consommation, même très faible, de viande rouge transformée peut augmenter le risque de mortalité et de maladies chroniques, notamment les maladies cardiovasculaires et le cancer colorectal. Autrement dit, s’il est plutôt déconseillé de consommer de la viande transformée, manger jusqu’à 500 g de viande rouge cuite par semaine ne représente aucun risque avéré pour la santé et est même conseillé du fait des micronutriments et protéines de qualité apportés par la viande.
Recommandations politiques sur les aliments d’origine animale terrestre
Les experts de la FAO se sont également intéressés aux politiques nutritionnelles de par le monde. Ils ont constaté que les recommandations relatives à la consommation d’AOAT étaient rares, essentiellement qualitatives et principalement destinées au grand public. L’analyse des documents relatifs aux maladies non transmissibles provenant de 51 pays a montré que la plupart des recommandations concernant les AOAT ne prennent que très peu en considération les apports en micronutriments. Or, il s’agit d’atouts essentiels de ces aliments (par exemple les apports en fer, zinc et vitamine B12 de la viande rouge), sur lesquels il est important de communiquer. En outre, les questions de durabilité n’y sont quasiment jamais abordées, tout comme celles autour du bien -être animal.
Par ailleurs, le rapport pointe un manque de précision concernant de nombreuses recommandations portant sur les consommations d’AOAT. Ainsi, dans la catégorie des viandes rouges, la plupart des recommandations concernent le bœuf, tandis que les viandes de porc ou d’ovins sont moins présentes, de même que les viandes blanches, les abats, les viandes d’animaux sauvages et les insectes. Enfin, la sous- et la sur-consommation d’AOAT par rapport aux niveaux recommandés y sont rarement abordées : « Il s’agit d’une lacune importante étant donné la coexistence des carences en micronutriments avec la surcharge pondérale, l’obésité et les maladies non transmissibles », précise les auteurs.
((Encadré))
Une remise en cause définitive des rapports GBD 2019 et EAT-Lancet ?
Après les parutions de l’étude de 2019 du Global Burden of Disease (GBD) et du rapport EAT-Lancet la même année, les temps ont été durs pour toute personne convaincue du rôle nutritionnel (et environnemental !) d’une consommation modérée de viande rouge de qualité. Les conclusions de ces documents étaient tellement tranchées que toute argumentation semblait perdue d’avance. Heureusement depuis, de nombreux experts se sont mobilisés, publiant diverses critiques, tant scientifiques que déontologiques (voir nos articles « Augmentation des décès et consommation de viande rouge : des estimations très discutables ! », « Des chercheurs questionnent certaines hypothèses de calcul des risques liés à la consommation de viande », « L’association britannique des transformateurs de viande réclame à The Lancet le retrait de l’étude GBD 2019 », « Projet EAT-Lancet : une prise de distance de la part de l’OMS d’après le British Medical Journal », « Régime EAT-Lancet : une nouvelle analyse remet en question les effets santé », « Estimation des carences en micronutriments du régime alimentaire planétaire EAT-Lancet »). S’il est peu probable que ce rapport de la FAO mette un terme aux débats sur la place de la consommation de viande rouge dans les régimes alimentaires, il a le grand intérêt d’apporter un nouveau regard expert, étayé et mesuré, basé sur une analyse à la fois systémique et mondiale.
Source : FAO
[1] Avis relatif à l’actualisation des repères alimentaires du PNNS pour les enfants de 4 à 17 ans et pour les femmes dès la ménopause et les hommes de plus de 65 ans, 2019, préconisant de respecter la limite générique de 500 g de viande hors volaille cuite par semaine.
[2] WCRF-AICR. Diet, Nutrition, Physical Activity and Cancer: a Global Perspective (Third Expert Report), May 2018, qui fixe une consommation maximale hebdomadaire de viande rouge (bœuf, agneau, porc, veau, cheval…) de trois portions, c’est-à-dire environ 350 à 500 g de viande cuite par semaine.
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