Les recommandations de CGAAER pour des systèmes alimentaires durables

Le ministère chargé de l’agriculture a missionné le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) afin de se préparer à un possible futur règlement de l’Union européenne (UE) sur les systèmes alimentaires durables, tel qu’annoncé par la Commission dans la stratégie « Farm to fork » issue du Pacte vert. Pour cela, le CGAAER a réalisé un travail de veille réglementaire et bibliographique, et procédé à l’audition des principaux acteurs de la chaîne alimentaire, en considérant les trois dimensions de la durabilité (environnementale, économique et sociale), à la fois au niveau national, européen et international. En découle un rapport de 70 pages et une liste de sept recommandations.

 Résumé du rapport de mission de conseil

La transition vers la durabilité est une œuvre collective qui doit mobiliser tous les maillons de la chaîne alimentaire, depuis le consommateur jusqu’à l’agriculteur et réciproquement. Elle doit garder le cap de la souveraineté alimentaire, dont la dimension stratégique a été révélée par les crises sanitaires et géopolitiques.

De multiples initiatives, publiques et privées, sont prises en France pour réduire l’empreinte carbone des systèmes alimentaires, action prioritaire si l’on veut atteindre les objectifs fixés par l’Union européenne, eux-mêmes dictés par l’Accord de Paris. La dimension environnementale ne doit cependant pas éclipser les deux autres volets de la durabilité, économique et social. Sans une bonne combinaison des trois, il ne peut y avoir de transition juste et donc efficace.

L’adaptation de nos régimes alimentaires est nécessaire et doit être fortement encouragée, y compris par des mesures contraignantes sur la fiscalité ou la publicité. Elle ne sera pas seulement bonne pour notre santé et par conséquent pour la société, elle sera aussi bénéfique pour la planète. Le maître mot est « équilibre », qu’il s’agisse de la consommation de viande, de produits transformés ou innovants, d’aliments sucrés, gras ou salés. L’analyse de données et le développement d’outils numériques peuvent aider le consommateur à optimiser son régime alimentaire. Une attention particulière doit être portée aux populations fragiles confrontées à la précarité alimentaire.

En France, la transition agroécologique est en marche, confortée par la planification écologique et accompagnée par les diverses aides gouvernementales. Elle nécessitera des efforts dans la durée, qui devront être équitablement répartis entre les maillons des filières. A cet égard, il pourrait être intéressant de créer en Europe un marché obligatoire du carbone pour la chaîne de valeur agricole et de mettre en place, comme pour l’industrie, un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières. La résilience et la durabilité des productions animales et des productions végétales passent sans doute par une réassociation de l’agriculture et de l’élevage dans les territoires où la spécialisation liée à l’intensification de l’agriculture a atteint ses limites. Les produits sous signe de qualité et autres labels publics ou privés doivent être, plus et plus vite que tout autre, au rendez-vous de la durabilité. La réglementation doit aider le consommateur à s’y retrouver dans le foisonnement d’allégations flatteuses, car n’est pas durable qui veut.

Les substituts protéiques aux produits animaux sont prometteurs mais la nouveauté ne les rend pas de facto durables. Ils ne peuvent être évalués (et cela vaut aussi pour les nouvelles technologies), avant autorisation de commercialisation, à travers le seul prisme de la sécurité sanitaire : une étude d’impact et une analyse coûts-bénéfices complètes, associant le public, sont indispensables. A défaut, ces innovations viendront les unes après les autres nourrir les polémiques qui agitent la société. Par ailleurs, les substituts devront assumer pleinement leur composition et trouver leur public sans avoir besoin de plagier les produits animaux.

L’Union européenne est à la pointe du combat pour la durabilité au niveau mondial. Toutefois les élections au Parlement diront si les priorités du Pacte vert affichées en novembre 2019 par l’actuelle Commission sont toujours d’actualité en juin 2024. Il n’est pas sûr que le règlement annoncé sur les systèmes alimentaires durables voie le jour. Il ne serait pas simple, économiquement et socialement, pour la France de continuer à avancer seule. Les efforts de durabilité demandés aux producteurs français et européens seront d’autant plus difficiles que ces derniers seront confrontés à la concurrence d’importations non contraintes. Nous devrons donc convaincre à Bruxelles.

Pour en savoir plus : Systèmes alimentaires durables – Le poids de l’offre et de la demande

Source : Ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire

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