L’étiquetage au service d’une alimentation durable : le point de vue des consommateurs

Cette synthèse présente les résultats d’une étude réalisée par la CLCV et l’INRA sur l’étiquetage des produits alimentaires. La CLCV souhaite ainsi obtenir des informations favorables à la définition d’un étiquetage clair, fiable, pratique et pertinent pour les consommateurs. Pour l’INRA, il importe de mieux cerner le rôle que peut jouer l’étiquetage dans les évolutions conjointes de la demande et de l’offre alimentaires. Cette étude intègre les différentes dimensions de la durabilité de l’alimentation, en particulier nutritionnelle et environnementale. Une attention particulière a été portée aux catégories les moins favorisées de la population. Méthodologie : 4 dispositifs ont mobilisé 2 008 personnes faisant régulièrement les courses alimentaires. 68 % sont des femmes, 98 % des urbains, 14 % ont moins de 30 ans, la majorité ont un niveau de vie inférieur à la moyenne de la population française. – Un test d’économie expérimentale (questionnaire en ligne, le plus proche possible d’une situation réelle), centré sur les comportements, pour évaluer les informations réellement utilisées en situation de choix. Les 989 participants devaient choisir 14 produits parmi 3 substituts proches. Leurs choix étaient effectifs et « conséquentiels » : ils choisissaient des produits réels qui leur étaient effectivement attribués sous conditions. A noter que pour des raisons pratiques (envoi des produits alimentaires notamment, l’étude n’a pu porter que sur une sélection d’aliments transformés (biscuits, conserves, etc.) – Un entretien directif (face à face) réalisé par des bénévoles de la CLCV, pour hiérarchiser les priorités des consommateurs : classement sélectif des informations additionnelles souhaitées sur les étiquettes. Sur une tablette numérique, les participants devaient classer sélectivement des informations additionnelles qu’ils souhaitaient voir apparaître soit sur l’emballage soit sur internet. La mise en situation s’effectuait soit sur un pack de 8 yaourts nature, soit sur un paquet de petit-beurre (tirage au sort). Au bout d’un maximum de 4 interactions, ils ne devaient retenir que 3 informations additionnelles ; – Une enquête qualitative (face à face) : pour inventorier les opinions et croyances individuelles sur les sources d’information et la mention d’origine des produits, et quels acteurs  sont perçus comme les plus à même de délivrer une information fiable. Toujours en face-à-face, un questionnaire sur la crédibilité des sources d’information et sur les croyances à partir de l’origine de deux produits alimentaires (pommes et riz) ; – Des focus groupes pour faire émerger une position partagée, cerner ce qui fait consensus ou non concernant les critiques et propositions. 19 participants, répartis en deux groupes, l’un dont les personnes appartenaient à des catégories sociales plutôt aisées, l’autre plus modeste. Ils devaient dégager une expertise critique et collective. Principaux résultats :

  • Seul, le quart de l’information disponible est consulté. Il semble que les consommateurs buttent sur une capacité cognitive : ils rechignent à traiter plus de 2 à 3 informations pour choisir un produit, même si ces informations sont présentées de manière synthétique, format de présentation de l’information préféré des consommateurs.
  • En situation d’achat, le prix et l’origine sont les deux informations les plus prises en compte (le prix est pris en compte dans 35 % des décisions, l’origine dans 33 %). Ensuite, viennent les informations nutritionnelles, la marque et les labels (23 à 25 %). L’impact environnemental et la responsabilité sociale des entreprises, RSE ne viennent qu’ensuite  (17 et 13 %).
  • Pour les consommateurs, l’origine représente une sorte d’indicateur synthétique de qualité (nutritionnelle, environnementale, organoleptique, etc.).
  • Même s’ils utilisent assez peu les informations disponibles, les consommateurs sont demandeurs d’informations supplémentaires : 97 % des enquêtés ont ainsi sélectionné au moins une information supplémentaire à afficher sur l’emballage. Bien que les consommateurs issus des populations les moins favorisées ou avec un moindre niveau d’éducation utilisent moins les informations que les autres consommateurs, ils sont plus demandeurs d’informations supplémentaires.
  • Les informations supplémentaires souhaitées sont, dans l’ordre : usage de produits chimiques de synthèse, présence d’OGM, origine des ingrédients, informations nutritionnelles simplifiée et compréhensible.
  • Une partie des informations supplémentaires demandées correspond à une demande de clarification des informations obligatoires existantes : indicateur synthétique de la composition nutritionnelle, mention explicite de l’utilisation d’OGM ou de produits chimiques de synthèse. L’emballage est le support privilégié pour ces informations « de clarification », de même que pour l’origine des aliments, les ingrédients. D’autres supports (sites internet notamment)  sont privilégiés pour des informations dites « d’élargissement » (nouvelles informations aujourd’hui non obligatoires : environnement, RSE, etc.).

Les conclusions de l’INRA et de la CLCV :

  • « Bien que l’information affichée ne soit pas exhaustivement utilisée par les consommateurs lors de leurs achats, il convient de poursuivre les efforts faits pour mettre à disposition de tous une information plus complète. Cette information analytique doit être à la fois fiable (provenir de sources considérées comme telles), simple et parlante au consommateur attentif, ainsi qu’à ses délégués et à ses défenseurs. »
  • « En parallèle et en complément de cette information analytique, une information synthétique, saillante et facile d’usage, est indispensable. Ce type d’information permettrait de guider les choix des consommateurs dans le sens de ce qu’ils souhaitent et comprennent de l’alimentation durable. En effet, l’orientation des choix doit se faire d’une façon  pragmatique, sur la base de ce qu’il est légitime pour les consommateurs de privilégier, d’exclure, de limiter, de substituer. Notamment, la sensibilisation sur la portée et les limites de la proximité géographique comme signe pertinent de durabilité est une priorité. »