NRF-ai, un indice nutritionnel tout en finesse (Article de synthèse)
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Une équipe australienne propose un nouvel indice de richesse nutritionnelle des aliments (NRF-ai). Sa spécificité : il intègre la prévalence d’un apport inadéquat en nutriments dans la population générale, voire dans les sous-groupes de population (selon l’âge, le sexe…). De quoi juger d’un œil nouveau de la qualité nutritionnelle d’un aliment.
Derrière l’acronyme NRF-ai se cache un nouvel indice nutritionnel. Sa particularité ? Alors que la plupart des modèles confèrent le même poids aux nutriments, indépendamment de leur présence dans le système alimentaire, cet indice tient compte de la prévalence d’un apport insuffisant ou excessif en nutriments dans la population (en l’occurrence chez les adultes australiens). D’où le « ai » pour adequate intake (apport adéquat).
Un indice intégrant l’écart aux recommandations
Point de départ de la démarche : les données de l’Australian Health Survey décrivant la proportion de la population dont l’apport habituel diffère du besoin moyen estimé défini par les recommandations nationales (Nutrient Reference Values for Australia and New Zealand). Sachant que tous les nutriments pour lesquels des données étaient disponibles ont été inclus, afin d’éviter toute idée préconçue.
Sans surprise, la prévalence en Australie d’un apport insuffisant ou excessif en nutriments varie selon les nutriments. Des modèles de pondération ont été élaborés sur la base de la distance par rapport à la cible : le poids accordé à chaque nutriment reflète le degré d’insuffisance ou d’excès. Si l’on considère l’ensemble de la population adulte australienne, le calcium a reçu la pondération la plus élevée (0,22), suivi des sucres libres (0,15 ; consommation excessive), du magnésium (0,13), de la vitamine B6 0,12) et du zinc (0,09). Ensemble, ces cinq nutriments représentaient plus de 75 % de la pondération totale. Les 13 autres nutriments ont reçu une pondération moindre, reflétant une moindre prévalence d’apports inadéquats dans la population adulte.
Bien entendu, dans les sous-groupes (sexe, classe d’âge), les pondérations varient : par exemple, les besoins en zinc étant plus élevés chez les hommes que chez les femmes (12,5 mg par jour contre 6,5 mg par jour) et la prévalence d’un apport insuffisant également beaucoup plus élevée chez les hommes (45,7 % contre 10,5 % chez les femmes), le facteur de pondération était de 0,17 pour les hommes (en 3e position dans le classement des nutriments), contre seulement 0,03 pour les femmes (en 9e position).
Applicable à tout aliment de composition nutritionnelle connue
Les auteurs ont ensuite appliqué ces nouveaux modèles de profilage des nutriments à une sélection de produits laitiers et leurs substituts. Parmi ces produits, le lait ordinaire a obtenu le score le plus élevé (0,160 par portion de 250 ml), profitant de sa richesse en calcium et vitamines A, B2 et B6. La boisson d’avoine non fortifiée a obtenu le score le plus bas ; celle enrichie en calcium a obtenu un résultat intermédiaire.
Les scores des profils nutritionnels varient également selon le sexe. Par exemple, le profil nutritionnel de la viande de bœuf s’avérait légèrement supérieur pour les hommes (0,134) comparativement aux femmes (0,125), en raison d’un facteur de pondération plus élevé pour le zinc dans le modèle appliqué aux hommes.
Le NRF-ai dans les politiques nutritionnelles
Selon les auteurs, l’harmonisation entre les outils d’établissement de profils nutritionnels et les recommandations alimentaires pourrait être améliorée en développant des modèles personnalisés pour des sous-groupes de population définis (âge, sexe, etc.). En pondérant les nutriments en fonction de la prévalence d’un apport insuffisant ou excessif en nutriments dans la population concernée, leur modèle :
- évite l’écueil de décisions subjectives concernant le choix et le nombre de nutriments à inclure,
- met l’accent sur les nutriments qui sont moins abondants dans le système alimentaire dans son ensemble et dont les risques d’inadéquation d’apports sont plus élevés dans la population.
Cette différenciation pourrait favoriser le développement de nouveaux produits alimentaires conçus pour répondre aux besoins de sous-groupes de population spécifiques (personnes âgées, femmes en âge de procréer, etc.) et contribuer à la réglementation du marketing et des allégations de santé visant des sous-groupes de population spécifiques.
Enfin, ce nouveau modèle est également utilisé par les auteurs pour explorer d’autres aspects de la durabilité, notamment le caractère économiquement abordable (score NRF-ai / $ australien) et l’éco-efficacité (NRF-ai / score d’impact environnemental).
Source : Ridoutt, B. An Alternative Nutrient Rich Food Index (NRF-ai) Incorporating Prevalence of Inadequate and Excessive Nutrient Intake. Foods 2021, 10, 3156. (PDF en libre accès)
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