Pacte vert pour l’Europe : quels impacts ? (Article de synthèse)

Dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe (Green Deal), le secteur agricole se voit assigner plusieurs objectifs à atteindre d’ici 2030. Quels impacts en termes d’émissions de gaz à effet de serre (GES) ? Et de production agricole ? Un récent rapport européen s’intéresse aux impacts de l’atteinte de quatre de ces objectifs, concernant les apports de pesticides et d’engrais et l’utilisation des sols.
Dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe (Green Deal), les stratégies Biodiversité (Biodiversity Strategy, BDS) et « De la ferme à la fourchette » (Farm to Fork, F2F) fixent de nombreux objectifs à atteindre d’ici 2030 dans les domaines de l’agriculture et de l’environnement[1] (voir notre article « Pacte vert : les politiques de l’UE s’adaptent pour concrétiser les ambitions climatiques »). Parmi eux : réduire de moitié l’utilisation de pesticides ; réduire de 20 % les apports en engrais ; atteindre au moins 25 % de terres cultivées en agriculture biologique ; et au moins 10 % des surfaces en aménagement paysager à forte biodiversité (haies par exemple). Dans un rapport publié en juillet dernier, le Centre commun de recherche de l’Union européenne évalue les impacts de l’atteinte de ces cibles en termes économiques et environnementaux.
Trois scénarios étudiés
Trois scénarios ont été modélisés. Dans le premier, la Politique agricole commune (PAC) reste similaire à celle de 2014-2020. Dans les deux autres, elle évolue selon les propositions législatives de la Commission européenne (« nouvelle PAC »), avec un plan de relance européen en plus dans le troisième scénario. Puis, ces trois scénarios ont été comparés à un scénario de référence sans cible à atteindre.
Des impacts environnementaux positifs
En termes environnementaux, les résultats de la modélisation montrent que l’atteinte des 4 objectifs précités génèrerait des effets positifs significatifs, notamment en termes d’émission de GES (- 20 % pour le scénario 1, près de – 30 % pour les scénarios 2 et 3). Les auteurs soulignent toutefois qu’une part importante de cette baisse serait en fait substituée par une hausse des émissions hors UE, du fait de la hausse des importations pour compenser la baisse de production en Europe. Près de 70 % des émissions « fuiteraient » ainsi hors UE dans le scénario 1 et près de la moitié dans les scénarios 2 et 3. Des chiffres surévalués cependant car, d’une part, la modélisation ne prend pas en compte les efforts engagés dans le reste du monde pour réduire les GES et, d’autre part, les évolutions de comportements alimentaires (moins de viande, moins de gaspillage) ne sont pas pris en compte non plus ; or ceux-ci devraient engendrer une baisse relative de la demande, et donc réduire les besoins en importation.
Mais un véritable défi pour le secteur agricole
Côté économique, les résultats montrent en effet des baisses de production agricole en Europe dans la plupart des filières, et ce, pour les trois scénarios : de – 13 à – 15 % pour les céréales ; – 12 à – 15 % pour les oléagineux ; environ – 14 % pour la viande bovine ; et de – 15 à – 16 % pour le porc. Ces baisses impacteraient les importations et exportations, générant des variations de prix et donc de revenus pour les producteurs.
Des limites à prendre en compte
Les auteurs soulignent cependant que ce rapport n’est pas une évaluation d’impact en tant que tel, car la portée de la modélisation est limitée à l’atteinte de quatre cibles et à la PAC. Ils estiment en outre que les outils de modélisation actuels devraient être améliorés. « L’approche de modélisation actuelle se concentre sur les compromis entre la protection de l’environnement et la production agricole sur la base de l’expérience passée, omettant de saisir les synergies positives associées à un meilleur environnement », écrivent-ils. Malgré ses limites, cette étude a le mérite de montrer l’ampleur du défi qui attend le secteur agricole dans cette transition.
Source : Commission européenne
[1] Le 14 juillet 2021, la Commission européenne a adopté une série de propositions (Green Deal) visant à adapter les politiques de l’UE en matière de climat, d’énergie, de transport et de fiscalité pour atteindre ces objectifs. Pour le moment, il ne s’agit que de stratégies sans répercussion législative.
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