Réchauffement climatique, élevage et affichage environnemental : un Webinaire de l’ITAB éclaire le débat (Article d’analyse)

Alors que l’affichage environnemental des aliments est en pleine réflexion, l’Institut Technique de l’Agriculture Biologique (ITAB) et ses partenaires ont organisé, le 8 juillet 2021, un webinaire sur les enjeux essentiels que constituent l’effondrement de la biodiversité, le changement climatique et l’exposition des citoyens aux pesticides. Parmi les interventions, Xavier Poux de l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI) propose une nouvelle méthode pour évaluer les émissions de GES et notamment considérer le pouvoir de réchauffement global du méthane.
Au cœur des préoccupations de chacun, les impacts de l’agriculture et de l’alimentation sur la santé des écosystèmes et des hommes sont également au cœur du futur affichage environnemental des aliments prévu par l’Etat. Un affichage qui doit permettre au consommateur-citoyen de se repérer simplement sur ces questions complexes et qui soulève bien des questions.
Nourrir la réflexion sur l’affichage environnemental
Dans ce contexte, l’objectif du webinaire organisé par l’Institut Technique de l’Agriculture Biologique (ITAB) était de donner à voir comment les différents enjeux environnementaux (effondrement de la biodiversité, changement climatique et exposition des citoyens aux pesticides) s’articulent entre eux, ainsi que les difficultés et options pour les rassembler dans un score environnemental pertinent. Les principaux enseignements tirés par l’ITAB dans le cadre de l’expérimentation d’Etat sur l’affichage environnemental qui vient de se clore ont été présentés, ainsi que les propositions de l’Institut pour un dispositif intuitif, transparent, et producteur de sens pour une véritable transition agricole et alimentaire, alignée avec des scenarii souhaitables et réalistes.
Elevage et émissions de méthane
Parmi les sujets épineux, la question de l’impact de l’élevage sur le réchauffement climatique. De nombreux travaux scientifiques engagent en effet à réduire l’élevage de ruminants pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) et ainsi répondre à l’enjeu climatique, et ce, quels que soient les modes de production. Mais encore faut-il tout examiner.
Xavier Poux de l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI) propose une nouvelle méthode pour évaluer les émissions de GES et notamment considérer le pouvoir de réchauffement global du méthane. Le fait est que le méthane a un cycle qui lui est propre et non pris en compte dans les systèmes de calcul (métriques) actuels. Le CO2 a une durée de vie très longue et s’accumule dans l’atmosphère même à un niveau d’émissions constant. Le méthane, en revanche, a un effet flash une trentaine de fois supérieur à celui du CO2, mais une durée de vie dans l’atmosphère limitée à 12 ans. Laps de temps au bout duquel il se transforme en CO2.
Considérer les pouvoirs de réchauffement globaux des différents GES
Dans un système d’élevage, ce CO2, en étant capté par l’herbe et les fourrages, rejoint le cycle “biogénique”. Dans les métriques actuelles, le méthane est “amorti” sur 100 ans, ce qui lui donne un poids exacerbé en termes de réchauffement climatique. Or, à émissions constantes, le CH4 ne s’accumule pas s et ne contribue donc quasiment pas au changement climatique. « Avec une baisse de 10 %, il est neutre climatiquement. Avec une baisse supérieure, il provoque un refroidissement », explique Xavier Poux, reprenant les analyses réalisées par des chercheurs d’Oxford. En revanche, l’analyse de l’IDDRI porte sur d’autres aspects que le changement climatique. Ainsi, si l’on diminue le nombre de vaches (et les prairies associées) pour réduire les émissions de méthane, il risque d’y avoir des conséquences sur d’autres enjeux, comme la biodiversité, mais aussi sur le changement climatique lui-même. En effet, l’élevage de ruminants permet par la production de fumier d’éviter une utilisation d’engrais azotés qui émettent 2,7 fois plus de protoxyde d’azote que le fumier. Or, le protoxyde d’azote est un GES ayant un pouvoir de réchauffement global sur 100 ans 310 fois supérieur à celui d’une masse équivalente de CO2. Ainsi, lorsque l’ensemble des données sont mises dans la balance, la solution couramment citée de réduction du cheptel de ruminants comme réponse aux grands enjeux environnementaux devient moins évidente et potentiellement contre-productive.
Source : ITAB.
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