Régimes végétaliens : à éviter chez les plus de 65 ans (Article de synthèse)
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Principalement motivée par des arguments environnementaux, la transition vers une alimentation plus végétale est en marche. Mais est-elle adaptée à tous ? Non, répond un groupe de chercheurs néerlandais qui s’inquiète de son impact délétère sur la masse musculaire et la force chez les plus de 65 ans.
La réduction de la consommation de produits animaux, au profit de produits végétaux, est dans l’air du temps. Mais ces régimes, s’ils peuvent s’avérer favorables à certains groupes de population, peuvent-ils être généralisés ? Des chercheurs s’inquiètent ainsi de leurs répercutions sur certaines populations fragiles, dont les personnes âgées. En effet, les conséquences de la consommation d’un régime végétalien à un âge avancé sur la masse et la force des muscles squelettiques restent inconnues. Or, les pertes de masse musculaire et de force liées à l’âge, qui débutent dès 50 ans, représentent un problème de santé publique émergent dans des populations vieillissantes : risque de fragilité, de chutes, d’hospitalisation, de troubles de la récupération et de mortalité. D’où la sonnette d’alarme tirée par un groupe de chercheurs néerlandais qui discutent, dans un article publié dans Perspectives, de l’impact potentiel d’un régime végétalien sur la masse musculaire et la force chez les 65 ans et plus.
Un état de l’art des connaissances
En pratique, l’article :
– propose un état actualisé des connaissances concernant les recommandations en matière de protéines alimentaires pour les personnes âgées, rappelant que les phénomènes de résistance anabolique liée à l’âge justifient que des groupes d’experts considèrent qu’un apport quotidien en protéines alimentaires de 0,8 g/kg/j est trop faible pour le maintien de la masse musculaire chez les plus de 65 ans et proposent d’augmenter l’apport nutritionnel recommandé (ANR)[1] pour les personnes âgées à environ 1,0-1,2 g/kg/j, avec une attention particulière au moment et à la qualité de la protéine consommée ;
– discute de la moindre qualité et fonctionnalité des protéines dans un repas végétalien ;
– explique pourquoi les stratégies actuelles, et notamment l’augmentation de la taille des portions visant à augmenter l’apport en protéines et en acides aminés essentiels et à compenser les propriétés anaboliques inférieures des aliments et des protéines à base de plantes, s’avèrent peu réalistes chez les personnes âgées (anorexie liée au vieillissement, rapide effet rassasiant des légumineuses connu chez les jeunes adultes et à confirmer chez les personnes âgées) ;
– explique qu’un régime végétalien augmente le risque d’un apport insuffisant en protéines chez les personnes âgées : les produits alimentaires d’origine animale apportent une contribution si élevée à l’apport en protéines alimentaires dans le régime alimentaire actuel des personnes âgées, que le remplacement de portions omnivores par des portions végétaliennes de même taille peut fortement affecter la quantité de nourriture et de protéines ingérées avec, à la clé, un risque de ne pas atteindre l’ANR en protéines;
– offre un aperçu des quelque rares études existantes concernant les régimes végétaliens et leur impact potentiel sur la masse musculaire et la force chez les personnes âgées, soulignant la nécessité de mener davantage d’études d’intervention pour évaluer les conséquences directes d’un régime végétalien sur ces indicateurs de santé.
Éviter le végétalisme après 65 ans
Dans une dernière partie, les auteurs livrent leurs conclusions : « Il n’est peut-être pas préférable de suivre un régime végétalien après 65 ans. » Un point de vue qui repose sur les moindres biodisponibilité et fonctionnalité des protéines d’un régime végétalien liées à :
– la matrice alimentaire des végétaux complets sources de protéines,
– les teneurs inférieures en acides aminés essentiels dans les aliments végétaux versus les produits animaux,
– et aux carences spécifiques en certains acides aminés essentiels dans les protéines dérivées de plantes.
Les auteurs estiment qu’un régime végétalien augmente le risque d’un apport insuffisant en protéines à un âge avancé et que les stratégies actuelles visant à améliorer les propriétés anaboliques des aliments à base de plantes ne sont pas réalistes pour la plupart des personnes âgées. Pour autant, conscients des preuves parfois lacunaires, ils appellent à des recherches supplémentaires afin de mieux comprendre les conséquences d’un régime végétalien sur la masse musculaire squelettique et la force à un âge avancé. Un appel qui semble déjà avoir porté ses fruits puisqu’une récente analyse des données de la cohorte américaine NHANES vient de conclure à l’importance de la qualité des apports protéiques lors de l’avancée en âge (voir article « Apports protéiques et force musculaire : des associations plus marquées avec les sources animales » Lien à ajouter à la mise en ligne).
Référence : Domić J, Grootswagers P, van Loon LJC, de Groot LCPGM. Perspective: Vegan Diets for Older Adults? A Perspective On the Potential Impact On Muscle Mass and Strength. Adv Nutr. 2022 Jun 1;13(3):712-725.
[1] ANR : apport nutritionnel quotidien moyen permettant de combler les besoins nutritionnels de la quasi-totalité (97 à 98 %) des sujets en bonne santé appartenant à un groupe donné, défini en fonction de l’âge et du sexe. L’ANR représente l’objectif de consommation usuelle chez les particuliers.
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