Revue bibliographique sur les mécanismes potentiels de la relation entre les consommations élevées de viandes et le risque de cancer colorectal
D’autres mécanismes que ceux habituellement étudiés pourraient expliquer la relation observée entre l’augmentation du risque de cancer colorectal et les consommations élevées de viandes rouges et de viandes transformées . Résumé : Le cancer colorectal (CCR) est le troisième cancer le plus couramment diagnostiqué dans le monde. La grande majorité des cas est liée à des causes environnementales plutôt qu’à des modifications génétiques héréditaires. Au cours des dernières décennies, des associations ont été observées entre la consommation élevée de viande rouge etd e viande transformée (ce qui s’apparente aux charcuteries) et l’augmentation du risque de CRC. Parallèlement, des hypothèses sur les mécanismes cancérogènes qui sous-tendent l’association entre le CRC et la consommation de viandes rouges et transformées ont été proposées et étudiées dans le cadre d’études biologiques (composés cancérigènes, procédés de salaison, fer héminique…). Les deux hypothèses les plus étudiées sont : (1) la présence d’hydrocarbures aromatiques polycycliques et d’amines hétérocycliques, deux groupes de composés reconnus comme étant cancérogènes, et déterminés par la cuisson des viandes ; (2) l’effet des nitrites et de l’hème (hème nitrosylé) sur la formation endogène de composés N nitrosés et la peroxydation lipidique des graisses polyinsaturées. Cependant, aucune de ces hypothèses ne parvient à expliquer complètement le lien entre la consommation de viandes rouges et transformées avec le risque de CRC. Des scientifiques proposent d’autres mécanismes (Neu5Gc) ou affinent leurs hypothèses (effet protecteur du calcium du régime alimentaire, etc.). Cette revue offre une vue d’ensemble et une discussion critique des différents mécanismes cancérogènes potentiels qui sous-tendent la relation entre l’augmentation du risque de CRC et la consommation élevée de viandes rouges et transformées. Les auteurs estiment que compte tenu des différents composés présents dans la viande rouge et la viande rouge transformée, le risque accru de CRC peut ne pas être associé à un seul agent causal, mais à la présence d’un mélange de composés cancérogènes, agissant sur plusieurs stades du développement du CRC. Une consommation élevée de viandes rouges et en particulier de viande transformées (charcuterie) au sein de régimes alimentaires déséquilibrés pourrait ainsi créer un environnement favorisant différentes étapes du développement du CRC. Les mutagènes présents dans la viande rouge tels que les HAP, les HCA et les composés N nitrosés peuvent initier des mutations dans les cellules épithéliales. Un polymorphisme génétique et le microbiote peuvent alors jouer un rôle important en métabolisant ces composés. Les acides biliaires produits à partir des graisses, les produits finaux de la peroxydation lipidique et l’hème exercent un effet cytotoxique sur la muqueuse intestinale. Ce mécanisme peut être particulièrement important pour l’hème nitrosylé, présent dans la viande rouge transformée, et peut expliquer l’augmentation du risque associé aux charcuteries. Enfin, l’inflammation (le Neu5GC y contribue) peut également être impliquée dans le développement ultérieur du CRC. Des études mécanistiques complémentaires sont nécessaires pour étudier les effets combinés de composés présents dans la viande rouge et celle transformée, impliqués dans la promotion du CRC. Un rôle possible du NaCl (par exemple en améliorant la production d’espèces réactives de chlore) ne doit pas être ignoré. A ce sujet, un effet combiné a été récemment décrit avec un PAH (BaP) et un HCA (PhIP). Notons que l’impact global du régime alimentaire et les interactions entre les différents aliments et nutriment reste à prendre en considération dans ces hypothèses mécanistiques. Source : Demeyer D, Mertens B, De Smet S, Ulens M. Mechanisms Linking Colorectal Cancer to the Consumption of (Processed) Red Meat: A Review. Crit Rev Food Sci Nutr. 2016 Dec 9;56(16):2747-66.
Article 55/59 du dossier "Viande, alimentation et cancer"
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